La Cour d’appel d’Anvers a tranché récemment une affaire relative au remploi d’un goodwill sur un cabinet dentaire
Dans ce dossier, l’administration soutenait que l’application de la taxation étalée visée à l’article 47 CIR 92 en ce qui concerne les immobilisations incorporelles requérait que les amortissements fiscaux soient appliqués sur l’élément d’actif concerné.
L’administration a constaté que la société contribuable avait acquis pour 85.000,00 EUR en date du 1er octobre 2001 le goodwill d’un cabinet dentaire. Le goodwill a été amorti à raison de 10% par an et ces amortissements n’ont pas été contestés fiscalement.
L’administration soutenait cependant que des actifs constitués ne peuvent être repris dans l’actif du bilan, et qu’ils ne peuvent donc pas faire l’objet d’un amortissement.
Selon l’administration, des plus-values réalisées sur des immobilisations incorporelles constituées n’entrent donc pas en ligne de compte en vue de la taxation étalée. Selon l’administration, il n’était pas réaliste de considérer que la patientèle cédée au cours de l’année 2012 par la société contribuable, correspondait entièrement avec la patientèle acquise en 2001.
Dans l’intervalle en effet, un certain nombre d’autres dentistes avaient également été également occupés au sein du cabinet, et le chiffre d’affaires avait connu une augmentation exponentielle.
Le régime de faveur de l’article 47 CIR 92 ne pouvait, selon l’administration, être appliqué que lorsque la nouvelle patientèle correspondait parfaitement avec l’ancienne patientèle ayant fait l’objet d’un amortissement, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
La cour estime que la question qui se pose ici est de savoir comment traiter la situation, lorsqu’il s’avère que la patientèle contenue dans le goodwill a évolué depuis son acquisition et sa comptabilisation. La plus-value réalisée à l’occasion de l’aliénation ultérieure du goodwill concerne t’elle encore la patientèle acquise à l’origine, ou est-elle plutôt en relation, éventuellement partielle, avec la nouvelle patientèle qui a été constituée?
En l’espèce, il est établi que le goodwill du cabinet dentaire qui a été acquis par la société contribuable en 2001 pour un montant de 85.000,00 EUR, a été entièrement amorti. Le goodwill a été cédé en 2012 pour un montant de 500.000 EUR. En l’espèce, la cour suit le point de vue de l’administration, puisque non seulement il correspond aux caractéristiques fondamentales du concept de plus-value, mais qu’il correspond en outre à la réalité.
C’est au contribuable, qui souhaite bénéficier du régime favorable de l’imposition différée et étalée, qu’il appartient de démontrer que le goodwill, tel qu’il a été acquis en 2001, est encore identique, ou du moins partiellement comparable, à ce qu’il était à ce moment, lors de sa cession plus de dix ans plus tard. Cette preuve n’est pas apportée en l’espèce. Les dentistes ne sont pas soumis à des conditions d’établissement, ni à une obligation d’autorisation, de telle sorte que, dans le cas présent, le goodwill ne contient aucun composant permanent de cette sorte. En outre, les patients d’un cabinet dentaire disposent du libre choix, et ils ne sont donc pas liés à leur dentiste. Il ne ressort d’aucune donnée objective qu’il existe encore, dix ans après, des personnes faisant partie de la patientèle, et qui seraient restés patients si le cabinet n’avait pas eu la modernisation et l’extension qu’il a connues. Il n’y a même aucune indication de ce qu’il existe encore en 2012, des patients qui fréquentaient déjà le cabinet avant 2001. C’est donc à bon droit que l’administration a exclu en cette affaire l’application de l’article 47 CIR 92.