La Cour d’appel d’Anvers dans un arrêt du 17 septembre 2024 souligne que des simples mentions formelles dans les procès-verbaux des assemblées générales ne suffisent pas à prouver que les options sur actions octroyées aux dirigeants d’entreprise sont des rémunérations pour des prestations réelles et rejette leur déductibilité.
La question de la déduction à l’impôt des sociétés d’un avantage en nature taxable de manière forfaitaire à l’impôt des personnes physiques fait souvent tiquer l’administration lorsqu’il y a une disproportion entre le coût pour la société et le montant de l’avantage taxable à charge du dirigeant d’entreprise (prenons l’exemple de la mise disposition d’un immeuble taxé sur base du revenu cadastral dont l’avantage est taxé de manière bien moindre que le bénéfice réel).
Dans un arrêt récent, la Cour d’appel d’Anvers a eu à connaître de la question de la déductibilité des frais engagés par une société dans le cadre d’un plan d’options sur actions accordé à son dirigeant.
Les plans d’options constituent une rémunération alternative dans les sociétés d’une certaine importance permettant de fidéliser à plus long terme les travailleurs afin que ceux-ci soient liées aux performances réelles réalisées par l’entreprise pour laquelle ils travaillent.
Le montant de l’avantage taxable est imposé de manière forfaitaire à 18% ou 9% de la valeur de l’action au moment de l’octroi.
Dans le dossier soumis à la Cour d’appel d’Anvers, une société unipersonnelle de médecin, avait octroyé à son dirigeant des options sur actions dans le cadre d’un avantage de toute nature.
La Cour a estimé que ces frais n’étaient pas déductibles sur base de l’article 49 du CIR 92, car le contribuable ne parvenait pas à démontrer que l’octroi de telles options rémunérait de prestations réelles fournies par le dirigeant.
La Cour d’appel d’Anvers a suivi la jurisprudence de la Cour de cassation[1] selon laquelle les avantages de toute natures octroyés aux dirigeants d’entreprise doivent être en lien direct avec des prestations effectivement fournies pour être fiscalement déductibles.
Selon l’article 49 du CIR 1992, les frais professionnels ne sont déductibles que s’ils ont été faits ou supportés dans le but d’acquérir ou de conserver des revenus imposables. Dans le contexte des dirigeants d’entreprise, cela signifie que les frais ne peuvent être déduits que s’il est prouvé qu’ils rémunèrent des prestations réelles.
En matière de charge professionnelle, c’est en principe le contribuable qui doit apporter la preuve du caractère déductible des charges qu’il entend déduire de sa base d’imposition.
Cette preuve peut être apportée par tout moyen, mais généralement, elle repose sur des documents tels que des factures, des contrats, des relevés bancaires, ou encore des justificatifs démontrant la réalité et le lien direct de la dépense avec l’activité professionnelle et la réalité des prestations.
L’arrêt de la Cour d’appel d’Anvers illustre la difficulté probatoire entre l’octroi d’un avantage en nature et son lien avec des prestations dans de petites sociétés unipersonnelle.
Le tribunal de première instance avait pourtant accepté la déduction en se basant sur le procès-verbal de l’assemblée générale de la société de médecins, qui indiquait que l’intention de la société était de rémunérer son dirigeant par des options sur actions, conformément à une politique de rémunération.
Cependant, en appel, la Cour a rejeté cette position, considérant que les mentions dans le procès-verbal étaient trop générales et ne prouvaient pas que l’octroi des options était directement lié à des prestations réelles. De plus, aucun document additionnel n’a été fourni pour démontrer que les options faisaient partie d’une politique de rémunération spécifique et justifiée.
Selon la Cour, une justification plus détaillée est nécessaire, sous forme d’analyses financières, d’objectifs mesurables ou de contrats formalisant les prestations.
La Cour a également mis en avant le risque de conflit d’intérêts, étant donné que le dirigeant était aussi l’actionnaire majoritaire de la société, rendant ainsi plus délicat le contrôle des avantages qu’il s’octroyait. Dans ces conditions, l’octroi d’options sur actions sans justification adéquate a été perçu par la Cour comme une libéralité, et non comme une rémunération pour des prestations réelles, justifiant ainsi le refus de la déduction.
L’arrêt met en évidence les difficultés rencontrées par les petites entreprises, souvent unipersonnelles, pour apporter cette preuve de manière formelle et substantielle.
Il est en effet, plus aisé pour des sociétés de plus grande taille d’établir des politiques de rémunération précises, parfois gérées par des comités spécialisés. Dans les petites sociétés, où il y a souvent une quasi-identité entre le dirigeant et l’entreprise, la démonstration est complexe.
[1] Cass 14 octobre 2016
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