Cette année encore, l’administration fiscale a annoncé opérer des contrôles ciblés relatifs à la prise en charge de facture de management (« management fees ») entre sociétés liées.
Pour rappel, la pratique des management fees consiste à administrer une société par une autre qui réalise les prestations de management et refacturer ces prestations à la société d’exploitation.
Si cette pratique n’a bien entendu rien d’illégal, elle n’est pas toujours du goût de l’administration notamment lorsque la société de management neutralise la taxation de ces prestations par des investissements déductibles alors que les factures de management sont également déduites de la base imposable de la société d’exploitation.
Dans cette hypothèse, l’administration fiscale s’oppose très régulièrement à cette déduction, en vérifiant strictement le respect des conditions de déductibilité de toute charge professionnelle, lesquelles figurent à l’article 49 du CIR.
Pour rappel les frais professionnels déductibles sont ceux :
- Qui sont « professionnels » ;
- En vue d’acquérir ou de conserver des revenus taxables ;
- Faits ou supportés pendant la période imposable ;
- Et qui sont prouvés par des documents probants ;
La Cour de Cassation a rendu le 15 octobre 2015 un arrêt précisant les conditions de déduction des prestations de gestion accomplies par une société de management.
La Cour estime que les documents qui sont produits (contrat de gestion, factures…) ne forment qu’un commencement de preuve et ne démontrent pas que les prestations sont réellement fournies.
En d’autres termes, la Cour admet que le contrat n’est pas simulé (il y a effectivement paiement conforme aux dispositions contractuelles) mais juge qu’un contrat formel est insuffisant car le contribuable doit apporter la preuve de la gestion exercée par la société de management.
L’administration est donc en droit de subordonner la déduction de toute facture à la preuve de l’effectivité et de la matérialité des prestations.
Elle estime ainsi régulièrement qu’une facture de prestations de management, forfaitaire et ne comportant aucun détail relatif aux prestations n’apporte pas la preuve de leur matérialité ou du fait qu’elles ont été effectivement réalisées. Sur cette base, elle refusera le plus souvent la déductibilité aux sociétés qui ne sont pas en mesure d’établir ces différents éléments. En la matière, le consensualisme et le formalisme sont révolus.
Sur un plan pratique, il ne convient plus de se contenter de disposer d’une facture conforme mais également de
- Veiller à la conformité des statuts de la société de management (objet social, absence de mandat gratuit) ;
- Disposer d’une convention détaillée reprenant les prestations et les modalités de leur rémunération ;
- Veiller à ce que la facturation soit conforme à cette convention et y préciser les prestations réalisées afin de pouvoir permettre à posteriori d’en contrôler la matérialité ;
- Bien que laissé au champ contractuel, s’assurer que les prestations de management soient conformes au prix du marché ;
Il conviendra d’être doublement vigilent dans la mesure où le refus de la déduction dans le chef de la société d’exploitation n’entrainera pas pour autant l’absence de taxation dans la chef de la société de management.
Emmanuel Delannoy
Avocat – Droit fiscal
ed@guilmotbassine.com
Cet article a été publié dans le Bulletin Juridique et Sociale n°584 (www.lebulletin.be) par maître Emmanuel Delannoy