Le Conseil des ministres vient de donner son approbation sur un nouveau projet de loi programme contenant de nombreuses mesures fiscales notamment concernant la réforme annoncée de l’impôt des sociétés.
L’occasion de refaire le point sur une partie de ces mesures concernant les sociétés:
Exercice comptable
En ce qui concerne les mesures qui, sur le plan des impôts sur les revenus, ont trait à la réforme de l’impôt des sociétés (art. 2 à 84), toute modification apportée à la date de clôture de l’exercice comptable à partir du 26 juillet 2017 resteront sans effet pour l’application de ces mesures.
Réduction de capital
Les réductions de capital sont exonérées d’impôt dans le chef de l’actionnaire personne physique (art. 18, al. 1, 2° et 2°bis, CIR 1992).
Désormais, si les capitaux propres ne sont pas constitués uniquement de capital, mais également de réserves, toute réduction sera imputée proportionnellement d’une part sur le capital, et d’autre part sur les réserves, étant entendu que l’imputation se fera d’abord sur les réserves taxées, qu’elles soient incorporées ou non au capital, et ensuite sur les réserves exonérées incorporées au capital.
L’imputation sur les réserves est dans ce cas assimilée à un dividende soumis au précompte mobilier.
Cette mesure concerne les opérations réalisées à partir du 1er janvier 2018. Si vous constatez qu’une partie de votre capital est constitué de réserve il est encore temps de courir chez votre notaire.
Avances productives d’intérêts
Dans le cadre de la requalification des intérêts d’avances productives d’intérêts, l’avant-projet vise désormais les créances sur la société se substituant à la notion plus restrictive de prêt (art. 18, al. 1, 4°, CIR 1992).
Entrée en vigueur: intérêts se rapportant aux périodes après le 31 décembre 2019.
ATN – Voiture de société – véhicule hybrides
Comme prévu, le calcul de l’avantage de toute nature afférent aux voitures de société sera modifié pour les véhicules hybrides achetés à partir du 1 er janvier 2018.
Si la batterie ne dépasse pas certaines normes en matière de « capacité énergétique », l’avantage devra être calculé comme s’il s’agissait d’une voiture utilisant exclusivement du carburant.
Entrée en vigueur : Bien que la mesure concerne les véhicules achetés à partir du 1er janvier 2018, elle n’entrerait en vigueur qu’à partir de l’ex. d’imp. 2021 se rattachant à une période imposable qui débute au plus tôt le 1er janvier 2020.
Déduction pour investissement
Pour les immobilisations acquises ou constituées entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019, au cours d’une période imposable qui se rattache à un des exercices d’imposition 2019 et 2020, le pourcentage de base de la déduction pour investissement à l’impôt des personnes physiques sera porté de 8 à 20 %.
Il en ira de même à l’impôt des sociétés, mais uniquement à l’égard des sociétés-PME (adaptation de l’art. 201, § 1, al. 1, 1°, CIR 1992).
Pertes
Les pertes subies dans un Etat contractant ne sont plus prises en considération, sauf s’il s’agit de pertes professionnelles définitives subies à l’intérieur de l’EEE (adaptation de l’art. 185, § 3, CIR 1992).
Entrée en vigueur prévue : à partir de l’ex. d’imp. 2021 se rattachant à une période imposable qui débute au plus tôt le 1er janvier 2020.
Plus-values sur véhicules d’entreprise
Les plus-values sur véhicules d’entreprise sont exonérées d’impôt moyennant remploi en des actifs éligibles (art. 44bis, CIR 1992).
A l’impôt des sociétés, cette exonération sera limitée aux plus-values réalisées au cours d’une période imposable qui se rattache à un exercice d’imposition antérieur à l’ex. d’imp. 2021.
Plus-values sur action et parts
L’actuelle exonération des plus-values sur actions ou parts à l’impôt des sociétés sera subordonnée, au respect de toutes les conditions d’application de la déduction des RDT, y compris la condition de participation minimale et la condition relative à la période de détention.
Les plus-values sur actions ou parts pour lesquelles la condition de participation minimale est remplie, mais pas la condition relative à la période de détention minimale, demeurent imposables au taux de 25 % (adaptation de l’art. 217, al. 1, 2°, CIR 1992). Cette imposition distincte sera supprimée à terme. La taxation au taux de 0,40 % des plus-values ‘exonérées’ dans le chef des sociétés non-PME est également supprimée.
Provisions pour risques et charges
A l’impôt des sociétés, les provisions pour risques et charges ne seront encore déductibles que pour autant que :
- les provisions découlent « d’engagements contractés par l’entreprise pendant la période imposable ou une des périodes imposables précédentes »,
- ou que les provisions découlent « d’obligations légales ou réglementaires, autres que les obligations découlant de l’application d’une réglementation comptable ou de dispositions réglementaires en matière de comptes annuels »
Charges payées anticipativement
Les charges payées anticipativement ou comptabilisées comme telles, qui se rapportent partiellement ou totalement à une période imposable future, ne seront déductibles au titre de frais professionnels de la période imposable au cours de laquelle elles sont soit payées ou supportées, soit comptabilisées comme dette, « ainsi que des périodes imposables suivantes, qu’en proportion de la partie de ces charges qui se rapporte à cette période imposable ».
Première annuité d’amortissement – pro rata temporis
Pour les immobilisations acquises ou constituées pendant l’exercice comptable, une première annuité d’amortissement n’est fiscalement admissible que pro rata temporis dans le chef des sociétés non-PME. Cette règle sera étendue aux sociétés-PME.
Il est en même temps prévu qu’aucun amortissement dégressif ne sera fiscalement admissible. La portée de cette exclusion n’est pas encore très claire. Est-elle générale ou concerne t’elle exclusivement la première annuité.
Entrée en vigueur: immobilisations acquises ou constituées à partir du 1er janvier 2020.
Frais professionnels déductibles à l’impôt des sociétés
- La cotisation spéciale sur commissions secrètes ne sera plus déductible fiscalement.
- Exclusion de la déduction, à l’impôt des sociétés, de « la partie prise en charge d’un escompte comptabilisé sur des immobilisations incorporelles ou corporelles non amortissables, ou financières, pour autant que le prix d’achat est inférieur à la valeur réelle majorée de l’escompte »
- adaptation de la déduction pour les intérêts payés en cas de sous-
- En exécution de la directive européenne contre l’évasion fiscale, l’avant-projet prévoit des règles détaillées en matière de déduction des intérêts (avant-projet de loi, art. 40) ;
Suppression des exonérations à caractère économique
Intérêts notionnels
Dans le nouveau système, seul le « capital supplémentaire » déterminé par rapport à une moyenne reprenant les cinq années précédentes sera pris en considération comme base de calcul.
Déduction après contrôle fiscal
A l’impôt des sociétés, et exception faite de la déduction RDT de l’année même, aucune des déductions visées aux articles 199 à 206 et à l’article 536, CIR 1992 ou compensation avec la perte de la période imposable ne pourra plus être opérée sur les suppléments de la base imposable établis à la suite d’un contrôle fiscal et pour lesquels « des accroissements [d’impôt] d’un pourcentage égal ou supérieur à 10 % sont effectivement appliqués ».
Taux de l’ISOC
Le taux général de l’impôt des sociétés est ramené dans une première phase à 29 % et plus tard à 25 %.
Pour les sociétés-PME, le taux sur la première tranche de 100.000 EUR sera réduit à 20 %.
Pour que cette réduction puisse s’appliquer, la distribution d’un dividende de plus de 13 % ne constituera plus un obstacle (abrogation de l’art. 215, al. 3, 3°, CIR 1992).
La rémunération minimale qui doit être allouée à au moins un des dirigeants d’entreprise est portée à 45.000 EUR, mais dans le chef des PME débutantes, cette condition ne devra pas être remplie durant les quatre premières périodes imposables à partir de leur constitution.
La contribution complémentaire de crise sera ramenée de 3 à 2 centimes additionnels à partir de l’ex. d’imp. 2019 se rattachant à une période imposable qui débute au plus tôt le 1er janvier 2018. Et elle disparaîtra à partir de l’ex. d’imp. 2021 se rattachant à une période imposable qui débute au plus tôt le 1er janvier 2020.
Versements anticipés
A l’impôt des sociétés, le taux de référence pour le calcul de la majoration d’impôt en cas d’absence ou d’insuffisance de versements anticipés ne pourra pas être inférieur à 3%.
Rémunération du dirigeant
Une société qui n’alloue pas à au moins un de ses dirigeants d’entreprise, à charge du résultat de la période imposable, une rémunération au moins égale à 45.000 EUR, subira une cotisation distincte de 5 % puis de 10% àpd l’exercice d’imposition 2021 sur la différence entre 45.000 EUR et le montant effectivement alloué (avec un régime transitoire pour les sociétés ayant un faible résultat fiscal);
Pour les PME débutantes, la nouvelle cotisation distincte ne s’appliquera pas durant les quatre premières périodes imposables à partir de la constitution.
Un régime particulier est prévu à l’égard des sociétés ‘liées’ qui ne disposent que d’un seul et même dirigeant d’entreprise.
La cotisation distincte sera toutefois déductible comme charge professionnelle.
Absence de déclaration ou déclaration tardive
En cas d’absence de déclaration ou de remise tardive de celle-ci, une entreprise ou un titulaire d’une profession libérale peut, aujourd’hui déjà, être imposé sur un minimum forfaitaire de 19.000 EUR
L’avant-projet de loi prévoit, en ce qui concerne les sociétés, une augmentation de ce montant à 34.000 EUR; il ajoute qu’en cas d’infractions répétées, ce minimum sera majoré de 25 à 200 % selon les modalités déterminées par le Roi.
Le minimum sera porté à 40.000 EUR à partir de l’ex. d’imp. 2021 se rattachant à une période imposable qui débute au plus tôt le 1er janvier 2020.
Le minimum absolu sera en outre indexé annuellement à partir de l’ex. d’imp. 2022.
Intérêts de retard
Le taux des intérêts de retard en matière d’impôts sur les revenus s’élève actuellement à 7 %. Il sera dorénavant fixé annuellement, selon une nouvelle méthode de calcul, dans une fourchette de 4 à 10 %. L’avant-projet de loi ajoute d’emblée que le taux d’intérêt applicable pour l’année civile 2018 s’élèvera à 4 % (avant-projet de loi, art. 89).
Réduction d’impôt concernant les sociétés qui débutent
La réduction d’impôt actuelle pour ceux qui investissent dans le capital de sociétés qui débutent (subira certaines modifications en ce qui concerne les personnes qui sont exclues de la réduction d’impôt.)
Actuellement, cette exclusion s’applique notamment au contribuable qui est, directement ou indirectement, un ‘dirigeant d’entreprise’ dans la société concernée. L’avant-projet de loi précise que l’exclusion s’applique au contribuable qui est, directement ou indirectement, « au moment de l’apport en capital », un dirigeant d’entreprise. Le fait d’assumer plus tard un mandat de dirigeant d’entreprise dans la société ne fait pas obstacle à la réduction d’impôt, pour autant qu’il ne reçoive « aucune indemnité » pour cela.
Avocat – Droit fiscal